samedi

Urbain VIII

Voici une bouteille parmi les moins chères du rayon des vins qui miment le folklore ecclésiastique. Il s'agit d'un Côtes-du-Rhône d'une maison de Poussan.

A y regarder de plus près, les armoiries portent les clés de saint-Pierre et sont timbrées d'un chapeau noir aux pompons rouges-noirs...


Les codes héraldiques ecclésiastiques sont très clairs et il s'agit en l'occurence d'un chapeau de sable duquel pend, de chaque côté un cordon à six houppes de pourpre. Cet habillage indique qu'il s'agit d'un camérier ou d'un chapelain secret de Sa Sainteté. Aujourd'hui on dit tout simplement chapelain de sa Sainteté, c'est un un prêtre qu'on peu appeler Monsignor. C'est le plus modeste des trois rangs de monsignorifcation parce que tout ce qu'il y avait plus bas a été supprimé par le pape François. Leur origine remonte à l'époque du pape Urbain VIII. On va donc lui attribuer la paternité de cette fonction.

Pour revenir à notre blason il s'agirait donc de trouver un chapelain de Sainteté qui porterait les clés papales dans son armoiries... La chose semble trop belle pour ne pas indiquer une fabrication. Nous allons pour l'instant renoncer de fouiller plus loin... 

On remarquera qu'il s'agit presque des armoiries de la commune valaisanne de Bourg-St-Pierre qui ne cultive pas la vigne inversée à tout point de vue par rapport à celles de Wangen an der Aare dans la Haute-Argovie bernoise.


En tout cas l'usage des clés sur l'écu peut prêter à confusion avec le sigle des Châteauneuf-du-Pape sur les bouteilles traditionnelles, la nouvelle bouteille ne comportant qu'une mitre et pas les clés. 



J'ai découvert à Noël 2022 un ouvrage qui inaugure une série de portraits littéraires d'artistes plasticiens, Matthieu Mégevand écrit ici sur Philippe Fretz aux éditions art&fiction.


La première oeuvre reproduite en photo par Olivier Cristinat est Couvercle, 1986, 50 X 25 X 27 cm, huile/bois, qui montre la bouteille dont il est question dans cet article. On y reconnaît aisément les éléments graphiques de l'étiquette:


Quant à Urbain VIII (1623-1644) né Barberini, il a peut-être inspiré au Domaine de la Solitude, Châteauneuf-du-Pape, sa Cuvéee Barberini. Je vais enquêter. Mais il est possible qu'il s'agisse d'une allusion au cardinal Antoine Barberini nommé légat en Avignon par son oncle Urbain VIII ou de quelques autres membres de la famille. Antoine junior avait deux oncles cardinaux, Antoine sénior et Urbain VIII et un frère François senior, oncle du cardinal Carlo et grand oncle de Francesco junior. 

Voici deux variantes d'utilisation des armoiries Barberini dans les vins de ce domaine, mais qui ne correspondent à aucun standard héraldique.

Une tiare papale:

Et un double chapeau assez inattendu:


On trouve des Cuvées Barberini et des Cuvées Cornelia Constanza, dernière princesse Barberini. J'ai également repéré une étiquette avec des chapeaux épiscopaux verts qui correspondent à un vin blanc 


Si je n'ai pas pu établir à quel ecclésiastique fait allusion la cuvée Barberini, Cornelia Constanza, 1716-1797 était princesse de Palestrina, fille d'Urbano Barberini  dernier héritier légitime de la lignée Barberini du pape Urbain VIII dont il est le petit neveu, baptisé ainsi en son honneur. Candide de Voltaire paraît en 1759 et Voltaire y raconte l'histoire d'une vieille qui est fille du pape Urbain X (qui n'a jamais existé) et de la princesse de Palestrina. On est bien dans la famille, même si c'est une fiction de Voltaire. 

Les armoiries des Barberini montrent trois abeilles qui sont le sigle de l'amigne de Vétroz, pour indiquer la quantité de sucre résiduel.

Lors d'une visite au Vatican au début mai 2023, j'ai pu pénétrer jusque dans le choeur de la basilique Saint-Pierre où l'on voit le tombeau d'Urbain VIII surmonté de ses armoiries Barberini aux abeilles. Urbain VIII est dans une posture où son regard est dirigé vers l'énorme baldaquin qui a été installé sous son pontificat. Les armoiries à abeilles s'y laissent observer à de nombreux endroits.



J'ai également trouvé dans la librairie qui jouxte l'église de St-Louis des Français les actes d'un colloque:

Héraldique et papauté, sous la direction d'Yvan Loskoutoff, Presses universitaire de Rouen et du Havre, 2020, dont une contribution de Rocco Ronzani, "Nivei candoris visae sunt apes, Les Barberini et les abeilles de sainte Rita", pp.279-287 raconte comment les abeilles ont été au coeur du dispositif publicitaire de la famille Barberini.

Le 6 août 2025, j'ai trouvé une BD assez bien faite: Sambal Oelek, Stockalper, roi du Simplon,  Vevey, Castagniééé, 2009. Le dessinateur a rendu un hommage à l'histoire de l'illustration en utilisant plusieurs procédés, dont celui d'y faire figurer le pape sous les traits d'un autre. Ici Urbain VIII est représenté avec la face de Gabriel Imboden, directeur de l'institut de recherche sur l'histoire de l'arc alpin à Brig. 

Pour. bien souligner le procédé l'auteur le précise deux fois.

page 2: Dr Gabriel Imboden (qui a prêté ses traits au pape Urbain VIII, page 30) 

page 47: Gabriel Imboden - lequel prête ses traits au pape Urbain VIII (BD p.30)

Et sur le dessin lui-même Stockalper justifie le gag en prétendant que le dessinateur était ivre, il est vrai que ce portrait est humoristiquement très improbable et anachronique.


 On voit ici le visage de ce personnage:


 

 

 

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